Origines des parcours
En automne 2013, j’ai animé un module à l’Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles dans le cadre d’un pôle de recherche autour de l’art et l’handicap.
https://www.arba-esa.be/recherche/art-et-handicap-autour-de-la-personne-handicapee/
Avec les étudiant(e)s, il s’agissait de créer des cartes de Bruxelles en tenant compte de la perception des personnes aveugles. Les cartes pouvaient prendre différentes formes mais devaient être accessibles à une personne qui ne voyait pas.
Dans ce contexte, j’ai fait la connaissance de plusieurs personnes aveugles à Bruxelles et il m’est arrivé à plusieurs reprises de marcher en leur compagnie. Lors de ces déplacements, j’étais sensible à la manière dont la personne s’orientait et construisait des repères. Ainsi, j’apprenais beaucoup sur ma propre perception et mon attention à l’environnement était différente.
Suite à ces expériences, je voulais créer des parcours qui ne sont plus seulement des promenades mais des espace-temps où la perception et la découverte de la ville deviennent des enjeux esthétiques.
dispositif
Nous sommes habitués à guider une personne non-voyante et l’avertir des obstacles pour arriver à une destination. Je voulais inverser cette tendance. Dans ces parcours avec des personnes aveugles, ce sont les personnes non-voyantes qui me guidaient.
En avril 2014, j’ai commencé à pratiquer ces parcours avec trois personnes non-voyantes : Saïd, Sabine, et Ibrahim. A chaque fois, j’ai proposé à la personne de faire un trajet qu’elle connaissait. Il n’y avait pas d’autres contraintes. Je voulais me laisser guider. La personne portait une caméra Gopro sur le torse qui permet à la fois d’enregistrer le son et filmer la rue devant nous.
Je demandais à la personne de me faire part de ses différentes perceptions qui étaient enregistrées par le micro de la caméra. Je posais parfois des questions.
altÉritÉ
« Ne pas voir », ce nʼest pas juste fermer les yeux. Cʼest tout un être qui ne voit pas. Etre aveugle, cʼest se déplacer de telle manière et cʼest appréhender lʼenvironnement avec cette singularité. Etre aveugle, cʼest une manière dʼêtre au monde.
En faisant ces parcours directement avec les personnes aveugles, en suivant leurs pas et en sʼadaptant au rythme de la marche, les personnes voyantes sortent des préjugés et des préétablis. Nous éprouvons la marche et les perceptions directement à partir de la rencontre.